
–L’auteur : Claude Quétel est un historien français spécialiste notamment de la « psychohistoire » (études des structures et des processus mentaux conduisant à la décision ou l’évènement.) Entre 1992 et 2005, il est le directeur scientifique du Mémorial de Caen. Il occupe de nombreux postes dans la recherche historique. Il collabore aussi au mensuel « Historia. »
–Précisions sur l’édition présentée : Claude Quétel, collection Tempus-Perrin, Poche, 2019, 256 pages, 8 euro.
–Mon avis : Le 1er janvier 2016, « Mein Kampf » (Mon combat) entre dans le domaine public. La question centrale est de savoir si oui ou non nous devons publier le livre d’Adolf Hitler qui deviendra après 1933, et l’accession de ce dernier au pouvoir, le bréviaire du nazisme que tout allemand se devait de posséder. Certains hauts dignitaires du nazisme ne l’ont même pas terminé, voir même pas lu du tout pendant bien des années. Il faut dire que l’intérêt dans la forme du « livre » d’Hitler écrit entre 1925 et 1926 depuis la prison de Landsberg à la suite du putsch complètement raté à Munich, est totalement nul. Ce texte, qui ne fût semble t’il pas tapé par Hitler lui-même, est une succession de propos incohérents, répétitifs, mélangeant toutes les strates des idées d’extrême droite allemande depuis la fin du XIXème siècle. Le pangermanisme émerge vers 1890 avec pour crédo la réunion de toutes les terres où résident de fortes minorités allemandes. On y trouve aussi l’idée d’une identité supérieure de la race aryenne, allemande, courant qui émerge là aussi fin XIXème. Le mouvement völkisch fait partie des sources d’inspiration d’Hitler. La haine des juifs, coupables de la défaite de l’Allemagne en 1918 avec le « fameux coup de couteau » dans le dos, est largement admise en Allemagne dans l’entre deux guerre. La lutte contre le « judéo-bolchevisme » est centrale. Hitler y apporte des idées d’une radicalité, d’une haine si profonde et débordante contre les juifs, qui fait de « Mein Kampf » un texte difficile à lire parce qu’issue des longs monologues obsessionnels d’Hitler dans tout ce qu’ils ont de plus repoussant aujourd’hui. Les dirigeants européens n’ont pas pris au sérieux les théories d’Hitler invoqués dans Mein Kampf. Ce fût une erreur monumentale. « Mein Kampf » est truffé d’erreurs, écrit dans un mauvais allemand, les idées exprimées sont un fourre tout. Néanmoins, cet ouvrage a une portée dangereuse. Les lecteurs dans leur grande majorité ne porteront aucun intérêt à ce texte. On peut supposer que certains nostalgiques, extrêmement peu nombreux, il faut le dire, en Occident, y puiseront un outil confortant leur radicalité. Mon avis tend plutôt vers la limitation de l’accès à « Mein Kampf » aux seuls chercheurs, professeurs en histoire et étudiants de cette même matière. Je sais que ce texte circule sur internet. Je pense que c’est une œuvre qui conserve son caractère plus que nocif s’il n’est pas remis dans son contexte et explicité par des spécialistes pour désamorcer la noirceur haineuse infligée aux lecteurs. « Mein Kampf » est en deux volumes. Réunies il y a tout de même 700 pages d’injures raciales, de délires sur le Lebensraum, la lutte à mort contre le judéo-bolchévisme, et bien sûr cette haines viscérale, extrême du peuple juif. L’idée n’est pas encore ensemencée de détruire le peuple juif en l’exterminant dans les camps de la mort, ceux qui ne correspondent pas au modèle ethnique et raciale délirant mis en place par les nazis. L’intérêt du livre de Claude Quétel réside dans le fait que l’historien nous permet de comprendre les idées et leurs portée dans la société allemande et à l’étranger, avant et après la prise du pouvoir par les nazis. Cette analyse est bien plus intéressante que celle de lire sans aucune mise en garde un tel tombereau de haine pure. Même si le livre de Quétel souffre parfois de répétitions, et même si je vous avoue n’avoir guère appris d’éléments nouveaux car mes études d’histoire alliées à mes nombreuses lectures sur le sujet m’ont permis d’avoir des bases solides sur cette période, ce livre d’histoire de meure précieux. « Ce livre « Tout sur Mein Kampf » de Claude Quétel s’adresse à ceux qui souhaitent mieux saisir la portée réelle du bréviaire nazi à travers tout le XXème siècle et ce début de XXIème siècle. Ce qui est certain, c’est que « Mein Kampf » conserve, presque cent ans après sa première parution, son caractère explosif et hautement sulfureux à ne pas mettre entre toutes les mains.
Ma note critique :

Je partage ton avis Frédéric : » A ne pas lire sans garde fou et analyse du contexte historique par un chercheur »!
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Je sais que tes brillantes et longues études te permettent de nous parler de ce livre.
À ne pas mettre entre toutes les mains..
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Sujet difficile…de savoir quoi faire lorsque MK est tombé dans le domaine public . Le choix d’ encadrer cette logorrhée me semble indispensable. Merci pour ce retour courageux .
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Un grand challenge que de lire ce livre mais certainement passionnant. C’est une période que j’aime à redécouvrir et cet homme est qd même passionnant…! Merci Fred… Bisous du Sud ☀️
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A manier avec précaution et néanmoins très très intéressant !!!!
Bon vendredi
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Je n’ai jamais perdu mon temps avec les 700 pages du torchon d’Adolphe et tu fais bien de recommander plutôt cette analyse d’historien. J’imagine que Mein Kampf doit être à la littérature ce que les tableaux d’Hitler étaient à la peinture, c’est à dire pas grand chose d’intéressant. Le problème avec ces guignols, c’est qu’on ne le voit pas toujours venir, on ne les prend pas au sérieux, n’est-ce pas Donald? Les ricains ont quand même porté au pouvoir un idiot à moumoute et au bronzage artificiel portant un nom de canard. On n’est pas sorti de l’auberge malheureusement…
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J’ai eu l’occasion de lire ce torchon il y plus de 25 ans, il était en vente libre chez Gibert à Paris. A l’époque on ne se posait pas autant de questions sur l’accès à sa lecture ni au fait qu’il soit en vente libre.
Depuis on a fait du chemin, et même si je ne suis pas pour l’interdiction d’un livre, je te rejoins complètement sur le fait que certains n’y verrons que cette haine sans prendre le recul nécessaire, de manière brute et sans réflexion.
Cela montre bien à quel point la société a évolué en s’encrant un peu plus dans la dérive et cela quelques soient les bords.
Mes parents ont coutume de dire que les extrêmes sont mauvais et qu’il faut regarder l’extrême gauche avec autant de suspicion que l’extrême droite. J’ai toujours trouvé cette phrase bizarre, mais aujourd’hui j’ai tendance à être d’accord.
Hitler a profité d’une époque et ses propos se sont enracinés dans le mal être ambiant et si nous prenons le temps de regarder nous vivons un peu ce même type de période.
Quand au livre lu lorsque j’avais 20 ans, j’en garde le souvenir d’une écriture pauvre, brouillonne où la haine se déverse par litres.
Je sais que j’avais choqué des amis et ma famille lorsqu’ils avaient su que je le lisais, mais j’étais persuadée et je le suis toujours, que pour contrer son ennemi il faut lire et découvrir son argumentaire.
C’est comme la radicalisation religieuse, il faut avoir assez de connaissances pour répondre et comprendre ce mécanisme.
Je suis contente d’appartenir à une génération qui a pu le lire librement, même si je réalise qu’il faut un esprit éclairé pour le lire avec distance et comme une étude de cas, ce qui aujourd’hui, malheureusement serait impossible à comprendre.
Attention ! Je ne dis pas que je plus éclairée que d’autres, loin de moi cette prétention, mais une certaine culture, réflexion et analyse permet effectivement d’avoir la bonne distance.
Le fait qu’aujourd’hui cela soit moins possible est pour moi la marque d’une société qui va mal et dont le niveau intellectuel est malheureusement plus bas.
Mon fils a 15 ans, et je ne l’ai pas vu étudier ce que j’étudiais au même âge. Abaisser le niveau culturel permet aussi de garder la main mise sur un peuple qui ne doit pas être éclairé justement pour être des moutons.
Un enfant qui lit est un adulte qui réfléchit et notre société a beau le dire, mais elle ne fait rien dans ce sens. Il suffit de voir les classiques de la littérature adaptée, mâchée…
Bref, je suis d’accord avec toi, ton article est édifiant et très juste, même si je regrette l’interdiction, je pense que certains ne devraient pas être en accès libre…
Triste réalité…
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Oui totalement, extrême gauche, extrême droite, même volontés de nuire et d’attenter aux libertés et droits fondamentaux des hommes et des femmes. Il n’y a qu’à voir le positionnement de J.L. Mélenchon et M. Le Pen sur la question de l’Ukraine. Ils sont tous deux pro russes. Quand en plus on sait que M. Le Pen est financé par les Russes, on peut douter de son positionnement opportuniste. Le monde est complexe, vivre en démocratie s’est accepter les divergences, tolérer les opinions différentes. Ces gens là sont endoctrinés et pour eux le monde est blanc ou noir. Il y a eux et les autres. Le monde est simple quand on ne reconnaît pas à l’autre sa dignité. Le positionnement de la raison nécessite davantage de conscience, c’est un parcours de pensée où le doute peut être présent. Là encore, pour ces extrémistes pas de place pour la pensée et encore moins pour le doute. l’autre rouge, brun, noir etc… est l’ennemi qu’il faut anéantir. Mein Kampf pourrait être écrit par un Alain Soral ou un Dieudonné, pareil à l’extrême gauche avec des ennemis différents mais une radicalité et une violence toujours aussi omniprésentes. J’ai lu Mein Kampf vers 17-18 ans par curiosité vu que je me destinais à mes études d’histoire. C’est un torchon sorti d’un esprit malade obnubilé par la race, le sang, l’espace vital, la loi du plus fort primant sur le droit, l’humanisme. Qu’une patrie aussi cultivée que l’Allemagne ait pu trouver dans ce torchon le sens à leur vie en dit beaucoup sur le mal qui peut apparaître et réapparaitre sous une autre apparence mais avec cette même propension à la haine, au seul droit du plus fort. Poutine est de ce bois là. Totalement d’accord avec toi, l’effondrement de la pensée structurée, la pauvreté de la réflexion, du recul face à l’information, un vocabulaire limité au stricte minimum, tout cela est très inquiétant car avec des futurs citoyens aussi peu nuancés et incapable d’exprimer une pensée structurée, on cogne, on frappe, on invective, on insulte… nulle place pour le débat d’idées. C’est une mine d’or pour les extrêmes et c’est très inquiétant pour le futur de notre démocratie. C’est en ce sens que confronter à une pensée aussi pauvre, un torchon comme Mein Kampf, est hautement explosif. Oui c’est une triste réalité que nous vivons là.
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Totalement d’accord avec toi. Trump c’est le degré zéro de la pensée mais c’est un démagogue assez futé dans son rôle d’agitateur et de populiste surfant sur les fakes news et les milieux suprémacistes blanc. On retrouve le même chez l’ours russe et la Chine de Xi Jinping. Mein Kampf est un torchon sorti d’un esprit malade mais malheureusement il est lu sans aucun recul par des esprits incapables d’avoir une pensée structurée. C’est extrêmement dangereux. Je comparerais ça à une munition type obus retrouvée sous une couche de terre et qui malgré les années passées enfouies demeure toujours aussi néfaste et explosive.
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Mes meilleurs vœux pour 2023 Mamscook et au plaisir de lire tes délicieuses recettes ! @très bientôt 😊
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Le livre d’histoire est plutôt détaillé et reste une synthèse accessible pour une première approche du sujet, Bisous bretons chère Cat😘😊
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C’est gentil Matatoune ! Interdire, ne pas interdire, c’est complexe. C’est un peu comme avec les pamphlets antisémites de Céline. Il ne faut pas que ces « livres » ou torchons tombent entre des mains habitées par le mal, la haine, la pensée radicale du rejet de l’autre et de la démocratie. Ils sont de plus en plus nombreux malheureusement.
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Tu as raison, ça aide, merci beaucoup pour ce retour sur ma chronique, je t’embrasse très fort ! 😘😊✨
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Salut Eric, je vois que nous sommes d’accord sur ce sujet. Je te souhaite mes meilleurs vœux pour 2023 Eric ainsi qu’à ta famille ! 😊✨🌞
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Bonjour
Tous mes vœux à toi également, que 2023 soit belle et douce pour toi et ceux qui te sont chères
A très bientôt
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Pourtant la réflexion se cultive, mais il faut un terreau apte à recevoir. Si dès le jeune âge on le faisait, il y aurait moins de soucis à se faire ! Au lieu de ça on les abrutis de télé..
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😊😘🙏
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