Ma chronique : David Scarpa livre un scénario truffé d’invraisemblances, de raccourcis hasardeux, de scènes gênantes, voire franchement ridicules, avec des clichés s’enchaînant comme des perles accrochées à un collier. Le pauvre Ridley Scott signe une première heure et demi de son film, censé raconter « Napoléon« , absolument épouvantable. Un supplice pour les connaisseurs de l’Empereur, un supplice pour les amoureux de l’histoire de France et tous ceux qui, comme moi, ont suivi des études d’histoire à l’université. Le réalisateur réussit son pire long métrage avec des scènes s’enchaînant sans aucune mise en abîme ou explication du contexte. S’enchaînent une succession de scènes gênantes, pour un réalisateur d’une telle trempe. J’ai d’ailleurs faillit arrêter mon supplice au bout d’une heure. J’ai finalement tenu le coup pour vous livrer une analyse de ce « Napoléon », financé pour 200 millions dollars par Apple TV. La liste des affronts à l’histoire est trop longue. Dès le début du long métrage, mon pauvre cœur a cru lâcher en voyant Napoléon, censé avoir une vingtaine d’années, interpréter par un homme âgé du double. Napoléon n’a jamais assisté à l’exécution de la reine de France Marie-Antoinette. Les explications totalement farfelues et caricaturales de la Terreur et des évènements politiques de la France révolutionnaire sont absolument risibles. Par pitié, j’implore les professeurs d’histoire de ne pas conseiller ce film à leurs élèves. On ne comprend pas ce qui fait la force de cet homme persuadé d’avoir un grand destin. Le représenter en pauvre type peinant à jouir avec une Joséphine, le dominant telle une femme du XXIème siècle, version MeToo, est d’une bêtise confondante. Il a aimé Joséphine au tout début de leur relation, mais il savait depuis longtemps, qu’elle ne pourrait lui donner l’héritier qu’il souhaitait pour asseoir son régime. Joséphine ne fût pas la femme décrite dans ce long métrage. Imaginer Napoléon mené à la baguette par cette femme est totalement risible. Autre détail, Napoléon était un homme qui savait se contrôler d’une façon extraordinaire. Seuls quelques moments de son histoire l’ont vu perdre ce contrôle sur son entourage, ses courtisans, ses maréchaux. Il savait parfaitement jouer une sorte de rôle, tour à tour affable ou en rage, colérique, effrayant. Un passage du film le montre se trompant dans la façon de qualifier le souverain de Grande Bretagne. C’est totalement risible. Napoléon lisait énormément, il était doté d’une capacité de travail extraordinaire, d’une mémoire tout aussi exceptionnelle. Il n’a pas attendu Austerlitz pour obtenir des victoires militaires bâties sur des plans de bataille géniaux. On ne comprend pas dans le film, le caractère exceptionnel de son ascension, l’acuité de son analyse politique. Joséphine n’était qu’un rouage parmi d’autres dans sa quête de pouvoir. Sa mégalomanie avec des discours durant des heures et assommant ses proches, il n’était pas non plus dupe de la duplicité des hommes l’entourant. Il n’avait pas d’ami(e)s et ne se confiait pas. Les scènes entre Joaquin Phoenix et Vanessa Kirby sont grotesques. Napoléon avait une telle idée de lui-même, l’imaginer prononcer certaines phrases dans le film est totalement utopique. Il aima Joséphine, mais très vite, leur union pris une autre tournure. Il n’est certainement pas rentré de sa campagne d’Egypte pour rejoindre une Joséphine infidèle. Napoléon, lui-même, eut des maîtresses notamment une cantatrice. Joaquin Phoenix est mauvais, comme rarement, dans cette première moitié du long métrage. Deux expressions, une morgue fatiguée, notamment, mais nulle trace de la séduction d’un Napoléon qui savait, là encore, manipuler à sa guise son entourage et les autres souverains rencontrés. Je vais sauver, une dernière heure, qui prend enfin un peu d’ampleur. Austerlitz est malheureusement envoyé aux pas de charge. Le génie du plan de l’Empereur Bonaparte n’est pas assez souligné. Par contre, j’ai aimé la vision de la campagne de Russie, même si, là encore, elle est bien trop vite expédiée. Enfin, Waterloo, le grand moment du film, avec une caméra de Ridley Scott qui retrouve un peu d’ampleur. Financé, joué, tourné par des Britanniques/Américains, il ne pouvait en être autrement. L’interprétation de Joaquin Phoenix gagne en intensité dans cette toute dernière partie du film. Il semble enfin, prendre la pleine mesure du personnage historique, du mythe qu’il joue. Dernier point qui m’a franchement agacé, l’utilisation de chants corses dans la dernière partie du film. Napoléon est né en Corse certes, mais l’île de beauté, il l’a quitté très tôt, dès l’enfance. Il s’y rendra une dernière fois durant sa jeunesse, mais la Corse n’a jamais représenté quoique ce soit pour lui. Son père a soutenu Pascal Paoli durant les années 1760 contre les Génois, mais il a vite tourné casaque pour rejoindre le camp vainqueur, celui des Français de Louis XV. Par contre Napoléon ne parlait que le corse durant les trois premiers mois à l’école de Brienne en France. Au final, on obtient l’antithèse de « Barry Lyndon » de Stanley Kubrick. Le « Napoléon » de Ridley Scott manque cruellement d’ambition, son scénario est famélique et le souffle n’est présent qu’à de trop rares moments. Les erreurs historiques sont hallucinantes, le jeu de Joaquin Phoenix et celui de Vanessa Kirby ne procure aucune émotion. Ecrasé par le mythe, Ridley Scott se fourvoie en perdant son temps dans une intrigue se centrant sur Joséphine et sa relation avec Napoléon. Je ne dit pas qu’historiquement cet amour, qui se transformera très vite en amitié seulement, n’a pas d’intérêt, mais il est secondaire dans la destinée de Napoléon. Une catastrophe absolue qui fait craindre le pire pour une suite de « Gladiator. » Je déconseille vivement ce long métrage.

Mon avis :

Note : 1 sur 5.