Ma chronique : Couronné de prix littéraires prestigieux comme le prix Pulitzer en 2007, « La Route » de Cormac McCarthy a été adapté en 2009 au cinéma avec Viggo Mortensen. Il ne manquait plus qu’une adaptation BD et celle-ci est sortie au printemps de cette année et elle est l’oeuvre de Manu Larcenet. Et quel défi relevé brillamment, tant la gageure était difficile. Comment apporter sa touche à une oeuvre aussi célèbre et emblématique ? Manu Larcenet choisit des couleurs tournant autour du noir et du gris, comme pour mieux signifier les cendres emportées par les vents, les tornades sur les chemins de l’exode, dans un monde en fin de vie, où tout n’est que poussière, destruction et mort. L’histoire, vous la connaissez tous, un père et son fils tentent de descendre vers les côtes du sud des Etats-Unis. Ils ont un caddie contenant leurs maigres moyens de survivre, des objets hétéroclites trouvés ici ou là, et ils doivent sauver leurs peaux. Cela commence par éviter tout contact avec d’autres qu’eux-mêmes. L’autre est une menace et on ne peut leur donner tort tant les groupes armés cannibales défilent sur ces routes de l’exode suite à l’Armageddon, l’Apocalypse. C’est un récit extrêmement sombre, pessimiste, d’une noirceur abyssale. Je dirais même nihiliste et désenchanté. Plus d’oiseau, plus de fleur, que des carcasses d’immeubles éventrés, des voitures calcinées, des hommes réduits en esclavage par d’autres hommes, les conservant comme un garde-manger. La cruauté des hommes n’a pas de limite. Manu Larcenet réduit les dialogues aux strictes minimum. L’ambiance angoissante se suffit à elle-même à travers les illustrations lugubres. Un travail colossal justement récompensé par un succès critique et public dithyrambique. On a la gorge nouée une fois la BD achevée. La relation père fils est pleine d’amour malgré les conditions apocalyptiques de survie. Un père prêt à tout pour son fils. La mort est omniprésente. Partout. Tout le temps. Au final, Manu Larcenet réussit amplement son pari. Le rendu graphique est remarquable et l’adaptation se suffit à elle-même. Rarement, je n’aurais été aussi remué par la lecture d’une BD. C’est peu dire que je recommande « La route » adapté par Manu Larcenet d’après l’oeuvre de Cormac McCarthy. C’est à mon sens un chef d’oeuvre.

Larcenet Manu. « La Route ». Dargaud. 2024. 160 p.

Mon avis :

Note : 5 sur 5.