Je remercie chaleureusement Albin Michel et sa si belle collection « Terres d’Amérique » pour cette lecture enrichissante !

Je salue la traduction particulièrement réussie d’Hélène Fournier

Ma chronique :

Katherena Vermette nous revient avec un tout nouveau roman « Les filles de la famille Stranger ». Son premier roman « Les femmes du North End » m’avait déjà bouleversé, c’est à nouveau le cas avec celui-ci. Katherena Vermette est une autrice amérindienne et l’une des voix les plus importantes de la littérature canadienne contemporaine. C’est une œuvre chorale, un roman à quatre voix, quatre femmes qui sont mères et filles et qui sont issues de la communauté amérindienne du North End. Il y a tout d’abord Elsie, mère de trois enfants, de trois pères différents et qui a perdu la garde de ses enfants parce qu’elle est accro aux drogues dures et aux médicaments. Elle n’arrive pas à se sortir de ses addictions et c’est une réelle souffrance pour elle. Elle tente de s’en sortir, mais replonge à chaque fois. Margaret est la mère d’Elsie. Nous retrouvons également Phoenix, le personnage qui m’a le plus touché. Phoenix est dans une prison pour mineur, car elle a commis des actes particulièrement graves. C’est une jeune fille qui cache ses tourments et ses problèmes psychologiques derrière une violence exacerbée. En prison, son comportement erratique n’arrange rien à sa situation. Elle a accouché d’un bébé, mais son enfant lui a été pris. Elle a officiellement signé des papiers pour autoriser l’abandon de son bébé. Mais que peut comprendre une gamine aussi paumée à ces formulaires et à ce que cela entraîne. Phoenix est dépressive et solitaire. Son seul lien avec sa famille est sa sœur Cedar. Cette dernière est une jeune fille sérieuse et sensible qui va réussir à vivre avec son père, sa belle-mère et la fille de cette dernière. Cedar veut faire des études. Elle s’en donne les moyens. Elle aime sa sœur Phoenix et sa mère Elsie mais elle doit tracer son chemin et se sauver elle-même. Une nouvelle fois, Katherena Vermette nous dépeint les tourments de la population amérindienne dans une fresque magnifique, très bien écrite, avec un souffle romanesque puissamment évocateur. Le transgénérationnel est à nouveau convoqué pour expliquer les tourments de cette famille. La longue litanie des foyers d’adoption, des familles d’accueil, le poids des addictions, la misère sociale et affective. Il y a ceux qui s’en sortent et les autres qui restent sur le bas-côté, à ruminer leurs échecs, leurs faiblesses. L’autrice tisse la toile d’une tragédie grecque, mais avec un humanisme qui transcende les difficultés de la famille Stranger. Les liens entre ces quatre femmes sont brillamment analysés. Il y a toujours une part de lumière au cœur des ténèbres et c’est là toute la magie de l’écriture de Katherena Vermette. C’est vraiment une autrice qui a ce talent en plus. La traduction d’Hélène Fournier est particulièrement réussie. C’est à souligner. C’est un formidable roman que je ne peux que vous recommander. Une autrice à suivre.

Date de publication : 5 février 2025 ; Éditeur : Albin Michel ; Nombre de pages : 464 p.

Mon avis :

Note : 5 sur 5.