L’Histoire : Veuf et retraité, Ray Mathis mène une vie solitaire dans sa ferme des Appalaches. Dans cette région frappée par la drogue, la misère sociale et les incendies ravageurs, il contemple les ruines d’une Amérique en train de sombrer. Le jour où un dealer menace la vie de son fils, Ray se dit qu’il est temps de se lever. C’est le début d’un combat contre tout ce qui le révolte. Avec peut-être, au bout du chemin, un nouvel espoir.

Mon Avis : Un roman crépusculaire qui confirme la place primordiale de David Joy sur le vaste échiquier du roman noir américain.

Note : 5 sur 5.

David Joy s’est imposé, en quatre romans seulement, comme l’une des voix les plus importantes du roman noir américain. Rarement, un auteur n’aura aussi bien saisi les affres, les compromissions de l’Amérique du XXIème siècle. Fidèle à ses montagnes des Appalaches, lieu où se déroule l’essentiel de ses romans, source inépuisable d’inspiration pour l’écrivain. Ici encore, paru chez Sonatine, David Joy et son titre sublime « Nos vies en flammes » nous secouent, nous remuent jusqu’aux tripes avec cette histoire poisseuse, presque glauque dans sa première partie, sur fond de junkies, de trafic de drogues et de vengeance, celle d’un père pour son fils mort d’une overdose. David Joy n’a pas son pareil pour nous envoyer uppercut sur uppercut afin de nous amener à regarder, contempler ce que nous aimerions fuir ou repousser loin de notre regard et de notre petite vie bien rangée. Dans « Nos vies en flamme », nous sommes dans une ferme des Appalaches où vit Ray Mathis, un solitaire ayant perdu sa femme de maladie. On peut dire que le sort n’épargne pas ce pauvre Ray, puisque son fils Ricky, est un Junkie accroc à l’héroïne, qui vole même son propre père, pour se faire un fix et retrouver l’espace d’une montée le paradis des camés. Mais à chaque fois, la descente, le manque se fait de plus en plus terrible. Ricky mort d’une overdose, Ray va tout entreprendre pour retrouver les responsables et les empêcher à nouveau de nuire. David Joy, ne nous épargne rien des squats miteux, des ponts où s’agglutinent ces miséreux accroc à la Meth et à l’héro. Dans cette ambiance crépusculaire tissée de main de maître, l’auteur déploie sa narration avec talent. Nous sommes dans une réserve Cherokee où drogues dures, toxicomanie et addiction moissonnent leur lot de victimes chaque année. La corruption n’est jamais bien loin, car l’argent de la drogue fait vivre des familles entières dans la réserve. Mais Ray ne supporte plus cet état de fait, l’attentisme des autorités qui laissent faire, ferment les yeux sur des pratiques rapportant de telles sommes dans cet état ravagé par les fermetures d’usines, le chômage, la pauvreté, le déclassement social, l’absence de perspective pour une vie plus stable. Beaucoup d’émotions après avoir achevé cette lecture. On pense à Stephen Markley et son sublime « Ohio », à toute cette génération d’auteur(e)s américains sans concession pour les maux d’une Amérique où périssent chaque année des dizaines de milliers de personnes à cause du fléau de la drogue. David Joy ne tombe pas dans le sordide mais il nous démontre l’absurdité de la lutte contre les dealers, guerre perdue depuis longtemps du fait du nombre croissant de consommateurs de drogues dures. Ray veut sauver d’autres toxicomanes et les sortir des griffes des dealers. Sa vengeance, c’est aussi dû à ce sentiment de culpabilité pour Ricky parti trop tôt. Une histoire déchirante, écrite de main de maître par un David Joy au sommet de son art. C’est un des livres à ne pas manquer en cette rentrée littéraire !

Le 14 janvier 2022 : Portrait de l’écrivain américain David Joy à Tuckasegee en Caroline du Nord