et-toujours-les-forets-1265876L’Histoire : Corentin, personne n’en voulait. Ni son père envolé, ni les commères dont les rumeurs abreuvent le village, ni surtout sa mère, qui rêve de s’en débarrasser. Traîné de foyer en foyer, son enfance est une errance. Jusqu’au jour où sa mère l’abandonne à Augustine, l’une des vieilles du hameau. Au creux de la vallée des Forêts, ce territoire hostile où habite l’aïeule, une vie recommence. À la grande ville où le propulsent ses études, Corentin plonge sans retenue dans les lumières et la fête permanente. Autour de lui, le monde brûle. La chaleur n’en finit pas d’assécher la terre. Les ruisseaux de son enfance ont tari depuis longtemps ; les arbres perdent leurs feuilles au mois de juin. Quelque chose se prépare. La nuit où tout implose, Corentin survit miraculeusement, caché au fond des catacombes. Revenu à la surface dans un univers dévasté, il est seul. Humains ou bêtes : il ne reste rien. Guidé par l’espoir insensé de retrouver la vieille Augustine, Corentin prend le long chemin des Forêts. Une quête éperdue, arrachée à ses entrailles, avec pour obsession la renaissance d’un monde désert, et la certitude que rien ne s’arrête jamais complètement.

« Et toujours les Forêts » est un roman vertigineux aux allures de mythe prométhéen. En effet, Sandrine Collette signe ici un récit qui fera date. On la connaissait en reine du thriller, elle nous revient avec un récit d’anticipation qui la propulse une nouvelle fois au sommet. On est emporté par le souffle d’écriture, la puissance d’évocation rare qui se dégage avec force de cette histoire qui démarre comme un récit sur l’absence d’amour maternel, l’abandon, la solitude pour aboutir sur une odyssée mythique dans un décor apocalyptique où l’Armageddon a eu lieu. Mais même au milieu de ce désert de cendres, alors qu’il n’y a plus personne, l’instinct de survie qui fait partie de ce qu’il y a de plus profondément inscrit dans nos gènes, nous fait nous dépasser, nous permet d’affronter les plus grandes crises de désespoir. Car à l’heure où tout semble fini, le fil ténu de la vie demeure. Car oui la vie doit reprendre ses droits malgré tout. Roman sur la survie, sur le deuil d’une vie qui ne peut plus revenir sous la forme que l’on a connu auparavant, roman sombre, cri du cœur déchirant où l’on remonte au plus profond de notre animalité, récit aux allures de mythologie dans une humanité post-apocalyptique qui doit tout reprendre à zéro, « Et toujours les forêts » c’est un peu de tout cela en même temps. Le soleil n’est plus, le ciel est bas et gris, perpétuellement, les pluies sont torrentielles, le froid, la faim, le désespoir, le désert de cendres à perte de vue, ces cadavres brûlés, carbonisés par une puissance tellurique. La raison vacille, on pense avoir tout oublier de ce qui fait notre humanité, notre essence mais la lutte pour la vie est toujours là, chevillée dans notre cœur et notre corps, consubstantiel. Face au chaos, il faut trouver les ressources pour survivre et pourquoi pas un jour renaître. Corentin, personnage principal de ce livre vit tout ces expériences, ces traumatismes.. Fascinante destinée que la sienne, lui le petit garçon rejeté puis abandonné par une mère indigne et recueilli par Augustine, bloc de chaleur et d’amour. Puis il y aura l’adolescence et ensuite les fêtes étudiantes et l’insouciance du lendemain, la fuite dans les plaisirs éphémères et soudain, alors qu’avec ses amis ils plongent dans les entrailles de la terre l’apocalypse survient. A compter de ce jour, une idée l’obsède, retrouver Augustine et survivre malgré toutes les privations, les blessures physiques et psychiques, la mort qui ne demande qu’à lui ouvrir les bras. La force de ce livre c’est de nous faire à la fois connaître le néant et la vie, l’ombre et la lumière, l’abandon et l’amour. Dans ce combat de tous les instants, on frémit, on est ému comme rarement par l’écriture de Sandrine Colette. J’ai trouvé ce roman absolument génial. On lit de belles choses c’est vrai mais là on franchit un seuil avec « Et toujours les Forêts » qui démontre s’il en était encore besoin le talent immense d’une auteure à son sommet. Lisez le, achetez le, prêtez le, parlez en autour de vous. C’est LE roman de ce début d’année.

Ma note: 5/5

Broché : 334 pages
Éditeur : JC Lattès (2 janvier 2020)
Collection : Littérature française

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