D%u2019innombrables-soleilsL’Histoire : Walter a recueilli chez lui son ami Christopher Marlowe, laissé pour mort après une rixe. Dans le manoir au bord de la falaise, le poète en sursis rencontre Jane, l’épouse de son hôte. Entre ces deux insoumis naît une passion rare. Les corps et les esprits s’unissent dans un élan charnel et artistique, un amour hanté par la création et l’urgence du temps qui reste.

Je remercie les éditions Cherche Midi ainsi que Babelio pour leur confiance.

« D’innombrables soleils » est le quatrième roman d’Emmanuelle Pirotte (après « Today we live », « De profundis » et « Loup et les hommes »). L’auteure nous plonge dans l’Angleterre élisabéthaine, à la fin du mois de mai 1593, pour nous parler du poète et dramaturge célèbre : Christopher Marlowe. Ce dernier est mort « officiellement » le 30 mai 1593, mais les circonstances nimbées de mystère de son décès, laissent à penser que Marlowe a pu survivre à son agression et s’enfuir. C’est la théorie de certains historiens et le point de départ du récit envoûtant et enfiévré d’Emmanuelle Pirotte. Christopher Marlowe était le dramaturge, le poète, le plus connu après Shakespeare et surtout l’un des pères fondateurs du drame élisabéthain. Le récit débute donc ainsi, Christopher Marlowe est recueilli par son ami Walter dans son manoir. Walter a été l’amant de Christopher, il l’aime encore mais c’était sans compter sur les affres de la passion et de la rencontre avec Jane, l’épouse de son ami et hôte. La passion tumultueuse, entre ces deux êtres perclus de désirs, naît telles des braises incandescentes déclenchant un immense incendie de forêt. Dans ce manoir, sous les yeux d’un Walter désemparé, Christopher et Jane sombrent et franchissent les frontières de la folie pour assouvir leur insatiable soif d’amour. Tourmenté et tempétueux, Christopher a l’insolence d’une jeunesse pas si lointaine, lui qui se sent déjà toucher du doigt les portes de la mort et de l’enfer pour le simple fait d’être homosexuel. Jane quant à elle, s’est perdue dans un mariage où elle erre, âme en peine, femme délaissée d’un époux encore sous le coup de ses désirs homosexuels inassouvis. C’est un roman sur la part qui manque à chacun d’entre nous et que l’on pense retrouver chez l’astre aimé. Plongée vertigineuse dans une Angleterre élisabéthaine pleine d’hypocrisie quand à la question sexuelle, le roman d’Emmanuelle Pirotte est brûlant et nous de suivre l’immolation sur le bûcher des amants de Jane et Christopher, deux être perdus au delà des conventions de leur époque. L’écriture d’Emmanuelle Pirotte est toujours aussi sensible et belle, charnelle et insolente. On s’immisce dans les arcanes de la création intellectuelle d’un homme de lettre surdoué qui souhaite chasser les pestilences et les mensonges d’une société, d’une époque. Poétique et cédant aux douces incantations de l’union des amants transfigurés par le sexe, la fusion des corps et des esprits, il émane également de ce roman un parfum de mélancolie et de spleen qui font partie intégrantes des histoires d’amour tragiques. Comme si les amours se fanaient telles ces fleurs gorgées de soleil et de couleurs qui pourtant connaîtront la consomption et le pourrissement. Roman incarné où la chair est célébrée sur l’autel des amants, c’est avec un immense plaisir que j’ai lu «  »D’innombrables soleils » d’Emmanuelle Pirotte. Une auteure qui décidément n’a pas fini de nous surprendre et de nous envoûter. Je vous invite donc à découvrir son quatrième roman. Une réussite.

Ma note: 5/5

Broché : 240 pages
Éditeur : Cherche Midi (22 août 2019)

2018_Emmanuelle Pirotte