9791021010567_1_75L’Histoire : Il a fallu à la Révolution trois jours et deux nuits, du 14 au 16 octobre 1793, pour juger et exécuter Marie-Antoinette. Elle était condamnée d’avance. Ce face-à-face dramatique entre l’ancienne reine de France et ses juges dans la salle de la Liberté du Tribunal révolutionnaire de Paris tient tout à la fois du huis clos, du dialogue de sourds et de l’épreuve de force. C’est bien sûr le procès d’une reine, c’est aussi celui d’une étrangère, c’est enfin celui d’une femme et c’est celui d’une mère.

On a beaucoup entendu parlé, à juste titre, de « Juger La Reine » d’Emmanuel de Waresquiel. Essai historique, ce livre est une pépite alliant l’érudition, la réflexion à des questionnements passionnants et pertinents. Il est admirablement écrit et nous procure un plaisir de lecture rare. Il y a longtemps que je n’avais pas lu un ouvrage d’histoire aussi abouti et maîtrisé de bout en bout. Le sujet est, ô combien, passionnant : le déroulement du procès et de l’exécution de Marie-Antoinette, en Octobre 1793. La reconstitution est saisissante. Celle que l’on appelait « la veuve Capet » ou bien encore « la putain couronnée », Marie Antoinette. Au tribunal révolutionnaire, elle fait face à ses juges. D’aussi loin que je m’en souvienne, mon goût prononcé pour l’histoire, mon envie profonde de poursuivre des études dans ce domaine, tout cela est dû à une passion pour les livres et plus particulièrement ceux traitant de certains personnages historiques tels que Napoléon Bonaparte ou bien encore des souverains comme Saint Louis mais aussi Louis XVI et surtout son épouse la reine Marie Antoinette à qui j’ai toujours voué un véritable culte. La multiplicité des facettes de celle qui était Reine de France, Autrichienne, femme, mère, épouse, amante, avec tout ce que cela a pu déchainer comme fantasmes et comme haines ! L’auteur s’intéresse tour à tour aux parcours des geôliers, des avocats, des quinze jurés, des accusateurs. Une micro-histoire sociale, une histoire politique, une réflexion sur la Terreur et sa folie meurtrière, son aveuglement ! Marie-Antoinette, reine déchue, femme honnie, mère insultée, objet de tous les fantasmes.. Quand elle pénètre dans la salle d’audience, elle a le teint pâle, les cheveux blanchis, la robe noire recousue, la physionomie d’une femme brisée. La maladie la ronge de l’intérieur. En revanche, elle n’a en rien perdu de son courage, de sa ténacité, de sa fierté. Son chemin de croix, elle l’a affrontée avec un courage qui force mon admiration. Incomprise, pris dans l’étau entre révolutionnaires assoifés de sang et souverains, princes, aristocrates qui l’ont abandonné à son sort, elle est seule. Le comte de Fersen (qui restera son unique amour), isolé, tenta jusqu’au bout, mais malheureusement en vain, de la sauver. C’est face à l’adversité, qu’elle se révèlera comme une adversaire farouche de ces révolutionnaires qui lui feront payer le prix d’être une étrangère, d’être une femme libre, d’être une mère, d’être une amante.. Il est fort intéressant de noter que c’est au moment (jusqu’à la révolution) où s’épanouissaient les salons tenus par des femmes cultivées et curieuses de tout (littérature, philosophie, science..), que la révolution bourgeoise et masculine a cherché à faire taire cette volonté d’émancipation (que l’on songe à l’exécution d’Olympe de Gouge en novembre 1793). Une leçon d’histoire magistrale.

-« Juger la reine » est un magnifique livre d’histoire qui, à partir du destin d’une femme, analyse le contexte et le déroulement de ce qui fut un des premiers procès politiques.
(Télérama)

Ma note:♥♥♥♥♥/5.

81-TWNggB9LJacques Le Goff a écrit « Faut-il découper l’histoire en tranches ? » en 2013, peu avant son décès à l’âge de 90 ans. Cet historien était un immense médiéviste mais pas seulement, oserais je dire, tant il a œuvré pour la réflexion épistémologique de l’histoire (notamment sur la mémoire de l’histoire). Ce livre n’est clairement pas son meilleur (il faut dire qu’à ce titre le choix est rude tant la qualité est la norme dans son œuvre). J’ose ici un petit sacrilège qu’il me pardonnera, moi qui suis un grand lecteur de cet historien génial qui a tant bouleversé la vision que nous pouvons avoir du « Moyen Age. » L’ouvrage est intéressant. Il voit Jacques Le Goff s’interroger sur « la prétendue nouveauté de la « Renaissance », sa « centralité » et son rapport au Moyen Âge. La thèse de celui-ci, est que l’on peut parler d’un « long Moyen Age occidental » qui pourrait aller de l’Antiquité tardive (IIIème au VIIème siècle) jusqu’au milieu du XVIIIème siècle. Il insiste sur l’intérêt d’une histoire périodisée avec ces continuités, ces ruptures.. Faut-il une histoire « une et continue ou sectionnée en compartiments ? » La bibliographie peut piquer aussi à notre curiosité. Maintenant, voici pourquoi je minore quelque peu mes compliments sur cet ouvrage. En effet, si vous ne deviez lire qu’un seul livre de Jacques Le Goff, je vous recommanderais son « Saint Louis » qui est un authentique travail d’orfèvre et son chef d’œuvre absolu !

Ma note:♥♥♥♥1/2 /5.

A41830L’Histoire : Qui fut Saint Louis? Peut-on le connaître et, Joinville aidant, entrer dans son intimité? Peut-on le saisir à travers toutes les couches et les formations de mémoires attachées à construire sa statue et son modèle? Problème d’autant plus difficile que, la légende rejoignant pour une fois la réalité, l’enfant roi de douze ans semble avoir été dès le départ programmé, si l’on ose dire, pour être ce roi idéal et unique que l’histoire en a fait. Cette étude approfondie ne se veut – c’est ce qui fait sa puissante originalité – ni la «France de Saint Louis» ni «Saint Louis dans son temps», mais bien la recherche, modeste et ambitieuse, tenace et constamment recommencée, de l’homme, de l’individu, de son «moi», dans son mystère et sa complexité. Ce faisant, c’est le pari de fondre dans la même unité savante et passionnée le récit de la vie du roi et l’interrogation qui, pour l’historien, le double, l’habite et l’autorise : comment raconter cette vie, comment parler de Saint Louis, à ce point absorbé par son image qu’affleure la question provocatrice «Saint Louis a-t-il existé?».
On ne présente plus Jacques Le Goff qui fût l’un des plus grand historien médiéviste français du XXème siècle. Cette somme de près de 1280 pages ne doit pas rebuter le lecteur de par son ampleur proprement gargantuesque, car l’ensemble se lit avec un plaisir réel tant le style est avenant, maîtrisé de bout en bout. Il se dégage de son « Saint Louis » une puissance d’évocation, un souffle peu commun, marque des plus grands. Sur le sujet, cet ouvrage est une référence et le lecteur de cheminer en compagnie de ce personnage historique hors du commun. Une biographie et bien plus encore.

Ma note:♥♥♥♥♥/5.

J’ai publié en janvier 2015, une note à ce sujet, je vous mets le lien ici :
https://thedude524.com/2015/01/22/histoire-saint-louis-1214-1270/

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