196053.jpg-r_1920_1080-f_jpg-q_x-xxyxxL’Histoire : Novembre 1919. Deux rescapés des tranchées, l’un dessinateur de génie, l’autre modeste comptable, décident de monter une arnaque aux monuments aux morts. Dans la France des années folles, l’entreprise va se révéler aussi dangereuse que spectaculaire..

Qu’ils sont rares les films de cette essence là. Autant de précieux moments cueillis au gré d’une séance élégiaque ou comment Albert Dupontel nous offre une nouvelle fois, une véritable proposition en matière de cinéma. Un film d’époque en costume et qui ne sent pas la naphtaline. Un film qui remue les entrailles tels les chamans, intercesseurs entre une nature humaine veule, lâche, éprise du sang des autres que l’on sacrifie ainsi au gré des humeurs et de la volonté des puissants de ce monde et celui des rêveurs, des pures et humbles âmes. En ce sens, la Première guerre mondiale et la « Belle époque » (qui lui a succédé) ne sont pas si éloignés des horreurs commises en divers endroits du globe aujourd’hui. Une horreur mêlée d’insouciance, de crédulité, on s’amuse, on danse pendant que d’autres crèvent la gueule béante. La machinerie absurde des nationalisme, des souverains, des présidents de la République, des dictatures et autres régimes autoritaires de tout poil, le sacrifice des plus humbles au profit des élites. Le lieutenant Pradelle a ces émules, ces va t’en guerre prêt à sacrifier le monde pour satisfaire leurs ambitions, leur folie, leur cruauté. Pamphlet, brûlot contre ceux qui veulent embraser le monde à nouveau. « Au revoir là-haut » d’Albert Dupontel est un film hors du temps et pourtant terriblement, magnifiquement contemporain, comme si l’histoire bégayait sempiternellement, abusant des mêmes artifices, des mêmes relents pour pousser au suicide la civilisation ou tout du moins ce qu’il en reste. A mi chemin d’un Jean Pierre Jeunet et son « Un long dimanche de Fiançailles » mais avec ces aspérités propre au cinéma du plus anarchiste de nos rêveurs. Contempteur d’un monde qui n’a pas fini de s’avilir dans la fange, nous voilà glacé mais aussi volontiers souriant devant le long métrage et son histoire tout en finesse réalisé par Albert Dupontel qui, on ne le dira jamais assez est un acteur génial. Il y a du Charlie Chaplin chez lui. On ri, on pleure, on est révolté. Théâtre de l’absurdité du monde, Dupontel multiplie les clins d’œil, comme toujours dans son cinéma, contre les institutions jouant les apprentis sorciers avec la vie de millions d’hommes tenu entre leurs mains. La finance, le monde de l’argent, les dirigeants politiques, militaires, les religions.. personne n’est épargné. Il y a aussi des bulles de situations ubuesques à la Terry Gilliam dont Dupontel est le plus proche représentant de cette race là de réalisateur loin, très loin des conventions sclérosées codifiant le milieu du cinéma. Les acteurs, actrices sont exceptionnelles : Mélanie Thierry, Laurent Lafitte, Nahuel Perez Biscayart, Emilie Dequenne, tous au diapason d’un Dupontel qui nous livre là sa performance d’acteur la plus aboutie. Ne nous y trompons pas, « Au revoir là-haut » est un film majeur d’un réalisateur qui a une véritable perception de l’expérience qu’il veut proposer aux spectateurs. A des années lumières des errements nombrilistes, de la vulgarité d’autres, du manque de profondeur érigé en modèle écœurant d’un cinéma qui ne se conçoit trop souvent que comme étant ou d’auteur ou populaire, Dupontel est la quintessence d’un cinéma qui a des choses à dire et qui se donne les moyens, le talent pour les partager. Au milieu du marasme, du désert, une oasis, un point d’eau salutaire ou s’abreuver. « Au revoir là-haut » d’Albert Dupontel, c’est tout cela !

Ma note:♥♥♥♥♥/5.

018270.jpg-r_1920_1080-f_jpg-q_x-xxyxx« AU REVOIR LÀ-HAUT » Réalisé par Albert DUPONTEL« AU REVOIR LÀ-HAUT » Réalisé par Albert DUPONTEL