Ma chronique : Dans son dernier roman « La pouponnière d’Himmler », Caroline de Mulder s’intéresse à une maternité nazie située en Bavière : le Heim Hochland. Dans ce Heim, des jeunes filles, des jeunes femmes enceintes ou avec leurs nouveaux-nés. Leur point commun, ils sont tous et toutes enfants de SS. C’est Himmler lui-même qui a imaginé ces lebensborn où devaient se réaliser la naissance des enfants de sang pur, obsession des nazis et de son Reichsführer-SS. Les paladins du Reich étaient appelés à faire des enfants à ces jeunes filles pour assurer une nouvelle génération de guerriers au Reich millénaire. Caroline de Mulder s’intéresse à trois personnages pour nous faire pénétrer dans ces lieux. La première s’appelle Renée, elle est française et a seize ans. Elle vit en Normandie en 1944 lorsqu’elle rencontre un tout jeune adolescent de dix huit ans, un SS allemand. A la veille de partir au front, le soldat SS et la jeune française s’unissent. Malheureusement, elle doit partir car elle est enceinte et le sort réservé aux femmes ayant côtoyé l’ennemi est d’être tondu. C’est le traitement qu’elle subit alors elle s’enfuit vers l’Allemagne. Elle arrive en Bavière à la fin de l’été 1944. Dans le Heim de Hochland. En attendant son accouchement, elle y découvre un monde où la guerre ne semble pas avoir de prise. La nourriture, l’hygiène, les soins sont exceptionnels en cette période de guerre. Le deuxième personnage est une infirmière allemande du nom de Helga. C’est elle qui va s’occuper de Renée entre autres jeunes filles. Helga est aveuglée par son attachement au nazisme et sa mission au côté d’un médecin SS dont elle ne verra que trop tard les compromissions. Helga est du côté du mal absolu mais elle ne s’en rend même pas compte. La visite de Himmler à la pouponnière d’Hochland la transporte de joie. La guerre prend un mauvais virage pour les nazis depuis longtemps mais là les choses s’accélèrent en cette fin d’année 1944. Enfin, le troisième personnage s’appelle Marek, il a le sort le plus terrible car il est prisonnier et s’occupe du jardin du Heim. Il est traité en esclave par les SS, une bête avait un meilleur sort, lui qui a quitté le camp de concentration de Dachau avec ces tortionnaires. C’est un roman qui témoigne d’un sujet peu abordé, le tout avec une acuité réelle. Le sort des trois personnages alterne lors de courts chapitres. L’écriture n’est jamais redondante, elle va à l’essentiel pour nous décrire une situation tragique. L’Allemagne brûle sous les bombes, les assauts des armées alliées et soviétiques qui avancent en rouleau compresseur pour libérer le pays, et au milieu de ce chaos : le Heim. Ce qui au départ se voulait un « paradis nazis », se révèle être un outil de sélection drastique aux critères raciaux ubuesques. La folie destructrice nazie se répercute jusque dans ce gynécée quoique de façon très feutrée et clinique. En apparence, tout est fait pour le bonheur de la jeune fille allemande qui a procréé. Mais cette réalité se fissure face à la défaite totale des nazis qui se profile. Le sujet est passionnant, très bien traité et les trois personnages ont chacun un angle d’approche différent permettant de saisir au mieux le contexte de la vie dans ces lebensborn. C’est un roman où l’on mesure combien le sort des femmes était fragile. Caroline de Mulder s’intéresse avec brio au mal, au choix de ces femmes. Je recommande.

Mon avis :

Note : 4 sur 5.